Depuis sa création en janvier 2009 par un certain Satoshi Nakamoto, le Bitcoin ne cesse de faire parler de lui. Que ça soit en bien ou en mal, il attire l’attention. Les primo-adoptants ont pu en tirer profit et certains mêmes sont devenus millionnaires, d’autres y ont laissé leur chemise.
En tant que moyen de paiement, le bitcoin est accepté par un nombre croissant de commerçants. Mais il est encore très loin du niveau de la monnaie fiduciaire  avec ses milliards de transaction à la seconde. De par sa conception, il est beaucoup plus lent qu’une transaction par carte bancaire.

bitcoin

Capitalisation exponentielle

La hausse récente du Bitcoin correspond à un nouvel engouement assez inexpliqué des acteurs économiques pour les crypto-monnaies. Les investisseurs, un temps échaudés par sa volatilité qui avait porté le cours à un sommet de plus de 19 500 dollars en décembre 2017 pour rechuter ensuite, semblent de retour, notamment les institutionnels.

Cours du bitcoin au 7 avril 2021

Source : investing.com – Cours du 6 avril 2021

Le cours d’une cryptomonnaie varie en fonction de la demande. Celle du Bitcoin n’a cessé d’augmenter ces derniers mois pour dépasser un pic psychologique de 60.000 dollars le 13 mars dernier.

Bien que sa valeur soit a priori décorellée des marchés, dans certaines zones, en particulier en Asie, le regain d’intérêt pour la devise pourrait être en partie dû à l’instabilité des monnaies locales et aux risques inflationnistes qui encourageraient à utiliser les crypto monnaies comme un matelas de sécurité.

Les décisions politiques ont un impact

Les sanctions internationales envers les pays à risque rendent difficile la sortie de monnaie du pays ou même l’utilisation de certaines monnaies sur la scène internationale. Cette réalité encourage l’utilisation des cryptomonnaies. Les exemples récents en Iran et Irak ou encore la Corée du Nord pourraient conduire les populations de ces pays à se tourner vers les monnaies virtuelles pour contourner ces sanctions.

L’hyperinflation favorise également l’adoption du Bitcoin ou d’autres crypto-monnaies, comme au Venezuela où l’inflation a dépassé 1 000 000% en 2018. Le gouvernement vénézuélien a alors créé une nouvelle devise qui verra sa valeur calquée sur le « petro », la cryptomonnaie lancée pour échapper à l’hyperinflation.

Les cryptomonnaies d’État gagnent de plus en plus en popularité dans des pays frappés par des sanctions financières internationales, qui les voient comme un moyen de contourner ces embargos.

La peur du « système »

Avec une capitalisation de plus de 729 milliards d’euros, le Bitcoin peut faire peur aux institutionnels.
Les banques centrales s’agitent autour de la question des crypto monnaies et du Bitcoin. Nombreuses sont celles qui veulent mettre en place une réglementation. D’autres sont plus enclines à freiner voire interdire l’utilisation des cryptos. C’est le cas de la Chine depuis 2017, du Nigeria ou de l’Inde qui envisage de mettre en place une monnaie numérique de banque centrale.

Le Bitcoin évolue dans un espace non réglementé, et sa grande volatilité fait courir un risque élevé. Selon Christine Lagarde, Présidente de la BCE, le Bitcoin « n’est pas un monnaie mais un actif hautement spéculatif, qui a mené des affaires bizarres et certaines activités de blanchiment d’argent  totalement répréhensibles » (1).

Au plan politique, le ministre français des Finances, Bruno Le Maire, et son homologue allemand Peter Altmaier, avaient affirmé à la mi-janvier vouloir réguler le bitcoin, et annoncé que les deux pays présenteraient des propositions communes en vue du G20 Finances en mars.

Finalement, les ministres ont demandé aux institutions comme le Conseil de stabilité financière (FSB) de « continuer à surveiller les crypto-actifs et leurs risques, et qu’ils évalue une réponse multilatérale si besoin ». Le Conseil a également rejeté les appels de plusieurs pays qui demandaient une régulation des crypto-monnaies.

 

Les spéculateurs

Depuis quelques temps, les crypto monnaies deviennent des valeurs refuge à l’instar de l’or pendant la crise de 2008.

En janvier dernier, Tesla a acheté pour 1,5 milliard de dollars de bitcoins dans le cadre de la diversification des investissements de ses liquidités. A cette annonce, le prix du bitcoin a immédiatement augmenté, car le mouvement semblait signaler un changement vers une acceptation plus large de la crypto-monnaie en général. Un tweet d’Elon Musk et c’est 20 % de plus pour le Bitcoin et les autres crypto-monnaies comme le Dogecoin ou l’Etherum.

Les banques et les fonds spéculatifs vont de plus en plus sauter le pas, à la recherche de nouveaux rendements à une époque où les actions semblent enlisées dans la crise et où il y a peu de récompense à placer de l’argent en obligations et en espèces. Ce faisant, ils ont adhéré à l’idée que le Bitcoin restera dans le paysage économique et qu’il pourrait conserver cette valeur à long terme, comme le platine ou l’or, devenant ainsi un actif alternatif légitime

Nouveau moyen de paiement ?

Le Bitcoin n’est pas considéré comme une monnaie par les régulateurs monétaires à travers le monde, comme le répète Christine Lagarde. Pourtant, il occupe déjà ce rôle et est soutenu par des initiatives comme le Lightning Network (2) et plus récemment par des sociétés comme Paypal ou Visa qui sont en train de les intégrer à leurs systèmes de paiement.

S’il ne sera problablement pas l’avenir de la monnaie, c’est aussi et surtout pour d’autres raisons dont les principales sont les coûts de transaction, la vitesse et la sécurité, ainsi que les risques réglementaires.

Sa volatilité l’empêche également de devenir une unité de compte. En effet, Sa fluctuation constante ne permet pas de définir un prix fixe pendant une certaine durée sans subir de risque. C’est ainsi que le groupe Tesla offre depuis peu la possibilité de payer l’achat d’un de leurs véhicules électriques avec la crypto-monnaie mais affiche des mises en gardes assez alarmistes quant aux divers risques liés à la volatilité du Bitcoin, notamment en cas de remboursement demandé par l’acheteur.


Selon le G20 Finance, le Bitcoin représentent toujours un secteur minuscule équivalant à moins de 1% du produit intérieur brut mondial.

Et la planète ?

Le Bitcoin est souvent critiqué pour son impact écologique car le minage de la cryptomonnaie nécessite d’énormes ressources en électricité.

L’Université de Cambridge a lancé dès 2019 un indice en temps réel de suivi de la consommation totale d’électricité du réseau Bitcoin, le CBECI, et publie des rapports annuels sur l’étude comparative des crypto-actifs.

Selon une récente étude menée par l’Université de Cambridge, le Bitcoin consomme en une année autant d’électricité qu’un pays comme la Norvège, et plus que l’Argentine. Mais son empreinte carbone reste difficile à calculer. En effet, selon le rapport publié par Le Cambridge Centre for Alternative Finance en Septembre 2020 (3), 39% de l’énergie consommée pour le minage est d’origine renouvelable. Il est également important de noter que cette consommation se fait pour 70% en Asie et notamment en Chine où l’hydroélectricité alimente largement la production.

Il n’en reste pas moins que la consommation d’énergie pour une transaction en Bitcoin est la même que 453.000 transactions Visa ! et en terme d’empreinte carbone 710.000 transactions Visa car les sources d’énergie de ces dernières sont plus propres (4). 

 A une époque où les questions environnementales sont de plus en plus pregantes, cet aspect du Bitcoin et des crypto-monnaies en général génère beaucoup de réactions, interrogations, articles. Joule a publié une analyse intéressante rédigée par trois chercheurs de l’Université Technique de Munich qui laisse le débat ouvert. (5)

 

Qui peut prédire l’avenir ?

En 2013, le concessionnaire « Lamborghini Newport Beach » a vendu pour 1.000 bitcoins une Tesla modèle S qui coutait 110.000 dollars. Il est important de noter que la vente a été effectuée par un revendeur indépendant et non par Tesla. Néanmoins, à l’époque il était possible de réserver sa Tesla avec des Bitcoins sur le site officiel. Selon Elon Musk, il sera bientôt possible d’acheter une modèle 3 pour environ 1 Bitcoin.

La plateforme d’échange « Coinbase » a investi sa trésorerie dans les crypto monnaies depuis des années. Son bilan comptable comprend par exemple 230 millions de dollars en bitcoins et 53 millions en ether. Les entreprises allouent désormais elles aussi une partie de leur trésorerie aux crypto-actifs.

Nous sommes à un point de basculement, soit par l’explosion de la bulle spéculative, soit par l’adoption généralisée des monnaies numériques pour le commerce international. Mais il y a encore beaucoup d’obstacles. L’avenir est encore incertain tant que le fonctionnement de ce genre d’actif ne sera pas simplifié et sécurisé.

Alors que croire? Il y a beaucoup de prévisions très optimistes sur la valeur du bitcoin en 2021. Certains pensent que le bitcoin atteindra finalement 500 000 dollars, tandis qu’un analyste de Citigroup suggère un prix de 318 000 dollars d’ici décembre 2021.

De toute évidence, ces chiffres peuvent être trop optimistes. Cependant, en mars 2021, la perspective d’un bitcoin atteignant 60 000 dollars semblait impossible. Quel que soit son futur prix, la capitalisation de la principale crypto-monnaie sera clairement l’une des plus grandes histoires financières au monde et ce même si la bulle explose.

Article rédigé par Olivier Porfal, Consultant Senior Moyens de Paiement – Partenor Digital