Les origines et fondements des OKRs nous démontrent qu’ils sont plus qu’un simple outil. Ils ont déjà montré leur impact et devraient profondément modifier la culture de l’organisation et les interactions entre individus et groupes d’individus. Pour les ancrer dans les pratiques et le fonctionnement de l’entreprise, plusieurs éléments sont nécessaires mais également adaptables. Nous les regroupons sous l’appellation de framework (cadre de travail) plus souple et personnalisable qu’un processus ou une méthode.

Le framework OKR

Framework OKR

Artefacts OKR

Dès lors qu’un petit groupe de personnes doit être aligné vers un même but et se coordonner, les Objectives et Key Results vont être définis à un niveau stratégique et à un niveau opérationnel. Ces niveaux sont étroitement liés puisque les Key Results stratégiques permettent la définition des Objectifs opérationnels. Leur principale différence est le temps défini pour atteindre ces objectifs. Les différentes success stories permettent d’identifier les temporalités suivantes : les OKRs stratégiques sont à atteindre sur un an, les OKRs opérationnels sur trois mois.

Les Objectives

Le cœur de ce framework est bien évidemment les Objectives et les Key Results. Il existe trois types d’objectifs : « Engagé », « Ambitieux » ou « Apprentissage ».

  • L’objectif « Engagé » : ce type d’objectif est général directement lié aux métriques de pilotage opérationnel à court terme. Ils peuvent par exemple porter sur des versions de produits, des objectifs de recrutement, ou encore l’acquisition de nouveaux clients. Un résultat de 100% sera attendu pour être considéré comme un succès.
  • L’objectif « Ambitieux » : ce type d’objectif va permettre de contribuer à la mission, à l’idéal de l’entreprise : à quoi nous aimerions que le monde ressemble ? Il va donc adresser une vision plus large, des risques plus élevés, l’innovation et faire évoluer les équipes dans un contexte complexe et imprévisible. Un résultat de 70% sera considéré comme un succès.
  • L’objectif « Apprentissage » : ce type d’objectif va encourager les équipes à explorer et expérimenter. Lorsque le résultat est imprévisible, il permet aux équipes d’apprendre et/ou de valider des hypothèses pour parvenir à définir le meilleur résultat possible. Par exemple, une baisse de satisfaction utilisateur incomprise va nécessiter d’explorer différentes hypothèses et axes d’analyse pour en comprendre la cause. Certains choix technologiques vont également pouvoir être pris après expérimentation des différentes hypothèses. Pour ce type d’objectif, l’évaluation du succès va être contextualisée et assurée par une approche méthodique.

Quel que soit le type d’objectif, il doit être inspirant pour que les équipes donnent le meilleur d’elles-mêmes. Trop d’objectifs « Ambitieux » risque de décourager les équipes. Trop d’objectifs « Apprentissage » risque de faire baisser la livraison de valeur. Et ne définir que des objectifs « Engagés » risque d’instaurer une routine et de ne pas exploiter tout le potentiel des équipes. Bien qu’il ne soit pas obligatoire de tous les utiliser, il convient de trouver un juste équilibre entre ces trois types en fonction des enjeux stratégiques du moment, la maturité de l’organisation dans l’utilisation des OKRs et de l’expérience acquise sur les précédents cycles OKR.

 

Les objectifs peuvent être :

  • « collectifs » : co-responsabilité d’un groupe d’individus, ou
  • « individuels » : responsabilité d’un individu).

Il est courant d’avoir un mélange des deux car l’aspect collectif va stimuler la collaboration et l’aspect individuel va stimuler l’engagement, la motivation et la performance individuelle. Il est important de retenir que, si les objectifs individuels sont implémentés, ils le sont pour tous, top et middle managers y compris.

Les objectifs peuvent également être :

  • dédiés à un groupe d’individus : responsabilité d’une équipe, ou
  • transverses : co-responsabilité entre plusieurs équipes.

Là encore, il est sain d’avoir un mélange des deux car les objectifs dédiés vont stimuler la collaboration et la performance de l’équipe tandis que les objectifs transverses vont casser les silos entre les équipes et éliminer les jeux de pouvoir entre managers.

Ces différentes options de positionnement de la responsabilité des objectifs rendent complexes leur implémentation car :

  • le nombre limité d’OKR rend difficile le choix de positionnement des responsabilités
  • votre organisation ou votre business peut limiter certaines options
  • l’empirisme va permettre d’identifier ce qui fonctionne le mieux pour votre organisation

 

Les Key Results

Les résultats clés ont également deux types : « quantitatif » et « qualitatif ». Par exemple, pour une application mobile, un des résultats clés sera d’augmenter le nombre de téléchargements. Est-ce que toutefois l’objectif sera atteint si les utilisateurs téléchargent l’application et ne l’utilisent qu’une seule fois ? Ce résultat clé quantitatif initial pourra donc être associé à un résultat clé qualitatif tel que la fréquence de connexion à l’application ou la durée moyenne de connexion par utilisateur. Cette précision est bénéfique, voire essentielle, pour éviter de passer à côté de l’objectif.

En termes de responsabilité des résultats clés, nous retrouvons les mêmes combinatoires et enjeux que pour les objectifs : « collectif » ou « individuel », et « dédié » ou « transverse ». Cela amène un deuxième niveau de complexité dans l’implémentation car le nombre de possibilités est multiplié par les typologies d’objectifs et résultats clés ainsi que par les positionnements des responsabilités.

 

Les attributs

Enfin, chaque objectif et chaque résultat clé auront des attributs à qualifier :

  • Priority: la priorité permettra de guider les individus dans l’exécution au quotidien et de faire des choix quand, par exemple, la capacité sera limitée ou encore quand il y a aura des blocages pour la réalisation.
  • Progress Status: le statut d’avancement est défini au regard de valeurs des résultats clés et consolidé au niveau objectif. Il sera régulièrement mis à jour à tous les niveaux et sera suivi lors du rituel « (Bi)weekly OKR ». Il permettra de faire des mises à jour comme reformuler un KR trop facile à atteindre, trouver des solutions en cas de blocage, revoir les priorités…
  • Score : le score est évalué en fin de cycle et défini en fonction de l’« Assessment». Même si les métriques des KR sont toutes atteintes, le score pourra être revu à la hausse ou à la baisse en fonction des facteurs facilitants ou contraignants qui ont été rencontrés pendant le cycle OKR.
  • Assessment: l’appréciation des résultats est réalisée en fin de cycle. Elle va permettre de prendre du recul sur ce qui a été fait et vécu, l’idée étant de faire le bilan et de se poser la question « est-ce que nous avons utilisé tout notre potentiel ? ». Ces éléments de contexte apporteront beaucoup de valeur dans la définition des objectifs et résultats clés pour le cycle OKR suivant.

Processus de Gestion

Les OKRs vont être exécutés en suivant un cycle itératif d’une durée variable en fonction du niveau d’implémentation :

  • OKR Stratégique = 1 an
  • OKR Opérationel = trimestre
  • OKR Individuel = mois ou trimestre

Cette durée correspond à l’intervalle de temps sur lequel les individus et groupes d’individus vont s’engager pour atteindre les OKRs définis.

Etape du processus de gestion

Description

Mission

La Mission est le plus haut niveau de la hiérarchie des OKRs. Elle peut être formulée de façon synthétique (sous forme d’elevator pitch par exemple) ou déclinée en OKRs. Elle a pour objectif de projeter l’intégralité de l’organisation vers un but commun qui va permettre de guider l’élaboration des OKRs à tous les niveaux. En règle générale, elle fixe le cap pour a minima les trois prochaines années. Bien entendu, cela dépend de votre secteur d’activité et des événements qui peuvent venir perturber voire modifier la Mission de l’entreprise. La période de crise sanitaire que nous traversons actuellement a sans nul doute impactée la mission de nombreuses organisations à travers le monde et requis des ajustements.

OKR Planning

Cette première étape consiste à définir les OKRs. Nous avons vu que les différentes options possibles vont rendre l’exercice éprouvantcomplexe. À cela vient s’ajouter une collaboration verticale : les OKRs stratégiques peuvent être challengés par les équipes opérationnelles et, inversement, les OKRs opérationnels peuvent être challengés par les managers. De plus, une approche mixte (top/down et bottom/up) dans la définition des OKRs apporte beaucoup de valeur ajoutée et peut valoir l’effort investi.

La durée de ce rituel est en moyenne d’une demi-journée pour la « première version » et la définition des OKRs va se poursuivre sur plusieurs jours pour être affinée en fonction des retours des autres niveaux/groupes OKRs.

(Bi)weekly OKR

Ce rituel a pour objectif de suivre de près l’avancement des OKRs collectifs, non pas pour contrôler mais pour permettre à l’organisation de s’adapter et réagir en fonction des nouvelles priorités, des blocages et des retours des ce que les équipes rencontrent.

Il se déroule en deux temps :

·     Partage de l’avancement par les leaders (par contextualisation, métriques et faits).

·     Analyse de la situation et prise de décisions (abandon, modification d’OKR, priorisation, réallocation des ressources, élévation d’un OKR opérationnel au niveau stratégique…).

Ce rituel est au cœur de l’efficacité opérationnelle. Le temps alloué en moyenne est de 1h toutes les semaines ou 2h toutes les deux semaines.

OKR Review

Cette étape consiste à prendre du recul sur les réalisations faites et d’évaluer l’atteinte ou non des OKRs. L’évaluation n’est pas directement corrélée à l’avancement. Il est important de prendre en compte plusieurs éléments de contexte pour évaluer si les OKR.

Cette étape se réalise sous la forme d’un atelier de travail d’une demi-journée.

OKR Retrospective

Grâce à la prise de recul réalisée pendant la phase d’OKR Review, des leçons peuvent être tirées afin de s’améliorer sur la préparation et l’exécution du prochain cycle OKR. Chaque niveau d’OKR réalise sa rétrospective et partage ensuite collectivement les enseignements acquis.

La durée sera variable en fonction du format et de ce qui aura été vécu lors du cycle OKR.

 

Si les OKRs individuels sont généralisés, leur définition, suivi et revue seront réalisés en entretien individuel avec le manager correspondant et en suivant le rythme des différentes phases du cycle.

Les Rôles

 

Gardien OKR

Le gardien OKR est souvent un manager relativement élevé dans la hiérarchie de l’entreprise. En fonction de la taille de l’entreprise, ce rôle peut être incarné par plusieurs personnes. Le gardien OKR a un rôle d’influenceur. Il va s’assurer de la mise à jour des statuts d’avancement des OKR en temps et en heure pour la bonne réalisation des rituels. Il va également être vigilent à l’adoption des OKRs, par exemple en s’assurant que les statuts remontés sont le reflet de la réalité, que les individus comprennent le sens des OKRs et qu’ils ne deviennent pas un outil mécanique de reporting. Il sera le garant de la bonne application des OKRs. A ce titre, il pourra être amené à faire des rappels tant sur les actions, les comportements et la philosophie pour une bonne utilisation des OKRs.

 

Coach OKR

Le coach OKR va avoir une importance cruciale dans la phase de définition des OKRs et lors des rituels du cycle OKR. En posture de coach, il va permettre aux groupes d’individus d’approfondir leur réflexion, de formuler correctement les OKRs (typologie et responsabilité), de stimuler les échanges, de prendre du recul sur les arguments et les éléments de contexte afin que le groupe puisse par lui-même identifier « ce qui compte le plus » et établir les bonnes priorités. Essentiel au début du déploiement des OKRs, son rôle garde toute son importance dans la durée par sa posture neutre, son regard extérieur à la réalisation et son questionnement lors de l’animation des rituels.

 

Objective Leader & Key Result Leader

Ces rôles sont utilisés pour les objectifs et résultats clés qui ont une responsabilité collective. Ces leaders sont en général directement impliqués dans la réalisation et vont avoir pour responsabilité de garder une dynamique collective. Ils pourront être en charge de lever les blocages et favoriser la communication ainsi que la coordination pour l’atteinte de l’objectif ou du résultat clé dont ils sont leader. Lors du rituel (Bi)weekly OKR, ils présenteront l’avancement et fourniront des éléments de contextes. Ces rôles ne sont pas toujours utilisés.  Néanmoins ils apportent un plus dans l’engagement des individus et permettent de maximiser la motivation et productivité du collectif.

Outils de gestion des OKR

Les OKRs doivent être partagés par et avec les individus de l’organisation. Qu’ils soient individuels ou collectifs, tous les OKRs doivent être accessibles avec les informations les plus proches de la réalité.

Il est important que l’accès aux OKRs soit facile et rapide. S’il est nécessaire de naviguer dans une arborescence pour trouver le fichier Excel qui les centralise, ou encore naviguer dans l’intranet, cela va avoir un effet néfaste sur la mise à jour des attributs des OKR et la collaboration des individus et groupes d’individus.

De plus en plus de solutions permettent d’intégrer la gestion des OKRs avec d’autres outils. En fonction des outils utilisés par les équipes, intégrer la gestion des OKRs avec les activités opérationnelles peut avoir beaucoup de valeur ajoutée.

Former les utilisateurs va permettre de maximiser l’adhésion au changement, faire de l’outil un atout plutôt qu’une contrainte et permettre d’avoir accès à une information pertinente et à jour.

Continuous Performance Management & CFR

De nos jours, de nombreuses entreprises utilisent un processus annuel d’évaluation de la performance des individus. Ce processus est très chronophage et donc coûteux (en moyenne 7,5h par individu évalué). De plus, plusieurs études remettent en question son efficacité :

  • Seulement 12% des managers RH estiment ce processus hautement efficace pour piloter la livraison de valeur Métier.
  • Seulement 6% des managers RH pensent que ce processus vaut le temps investi.

Le management de la performance continue se base sur le principe que le rôle premier d’un manager est de se concentrer sur la relation entre individus et le développement d’une confiance mutuelle. Ce type de management peut être implémenté grâce à un instrument appelé « CFR » :

  • Conversations: un échange authentique et riche entre manager et collaborateur amène à développer une meilleure performance individuelle.
  • Feedback: bidirectionnel ou partagé entre pairs, il permet d’évaluer l’avancement et les résultats, et de guider vers de futures améliorations.
  • Recognition: exprimer la reconnaissance envers les individus méritants pour leurs contributions (quelles qu’elles soient) permet d’améliorer la motivation et l’engagement des individus et de renforcer le lien de confiance.

La conversation se veut bidirectionnelle avec un temps de parole important pour le collaborateur. Le manager prend une posture de coach (écoute active). Son temps de parole peut être réduit jusqu’à 10% de l’échange !

Le feedback repose sur des informations factuelles et mesurables. Le management 3.0 propose un outil très efficace pour cela : https://management30.com/practice/feedback-wraps/

La reconnaissance est très souvent sous-estimée. Les entreprises qui la pratiquent obtiennent une baisse du renouvellement du personnel pouvant aller jusqu’à -31%.

Associé aux OKRs individuels, les managers utilisent cet instrument en fonction des différentes phases du cycle OKR. Ainsi, les individus s’approprient la définition de leurs objectifs et les réalisent en cycle itératif court (1 à 3 mois).

 

Dans notre 3e et dernier article consacré à la Saga OKR, nous aborderons les impacts du déploiement des OKR sur l’entreprise.